Église de Landenne : le temps joue contre le patrimoine inestimable d’un village

Ma collègue Françoise Philippart vient de vous présenter un enjeu qui lui tient fort à cœur, pour des raisons ni plus ni moins affectives. Je partage ses sentiments, je ne vous le cache pas, parce que l’église de Landenne fait aussi partie de mon environnement. Il s’agit certes d’un enjeu qui revêt des apparences locales. Mais il n’en est pas moins que l’enjeu local que Françoise vient opportunément d’exprimer peut se traduire avec les mêmes mots dans une réflexion plus sociétale.
L’assemblée générale 2014 et le symposium d’ICOMOS (Conseil international des monuments et sites) viennent de s’achever à Florence ce vendredi. Ils avaient pour thème le patrimoine et les paysages comme valeurs humaines. Et c’est bien de cela qu’il est question aujourd’hui : privilégier le recours à un héritage collectif pour mener des politiques d’intérêt général, notamment en matière culturelle. Le groupe CDH-IC aura l’occasion d’y revenir chaque fois que c’est nécessaire, pour Landenne comme pour d’autres monuments. Parce que nous sommes convaincus que l’investissement dans la conservation du patrimoine est un facteur d’attractivité, de progrès démocratique et même de développement socio-économique.
L’église de Landenne vit un moment crucial, à la charnière entre le besoin d’une importante restauration et un point de non retour qui risque d’empêcher toute réaffectation. En clair, le temps joue contre ce monument.
Je souhaiterais revenir sur la chronologie la plus récente des travaux et réflexions liés à cette église :
- en date du 28 janvier 2010, le ministre Lutgen marquait son accord sur la restauration de l’église, avec en marge de cette approbation le travail d’un cabinet d’architecture notoirement qualifié pour ce type de projet ;
- en date du 20 avril 2012, le Collège communal m’informait de sa décision de suspendre toute initiative sur le dossier de l’église Saint-Remy de Landenne, considérant qu’il appartenait à la majorité politique suivante de se pencher sur l’élaboration du projet de restauration de ladite église ;
- le 21 mars 2014, L’IPW adresse un courrier à la Ville interpellant le Collège quant au fait qu’il n’a donné aucune indication à l’Institut sur sa volonté de faire redémarrer ce dossier. Le courrier précise aussi que Madame Barbier et Madame de Bruyn, respectivement historienne de l’art et architecte, ont eu récemment l’occasion de visiter le bâtiment, intérieur comme extérieur. Il s’avère, comme le précise le courrier, « que des travaux de maintenance (fermeture des accès aux pigeons, étançonnement des arcades, etc.) seraient nécessaires afin de préserver ce qui peut encore l’être et de sécuriser certaines parties du bâtiment, dans l’attente d’un projet global». L’administrateur général poursuit en écrivant que « si vous marquez votre accord sur la programmation de ces quelques travaux de maintenance, le descriptif pourrait en être fait par l’Institut pour aider la Ville ». On peut difficilement être plus proactif.
Depuis lors, plus de réponse de la ville, sauf erreur. Je ne vous cache pas mon inquiétude et j’en viens même à lutter contre la tentation de spéculer sur vos intentions. D’autant qu’un mail de votre service juridique, datant de 2012, demandait à l’IPW de « procéder à la recherche d’investisseurs privés ou publics pour toute formule de mise à disposition culturelle du bien, par le développement d’une stratégie commerciale appuyée sur l’étude du potentiel de réaffectation ».
Considérant votre silence sur ce dossier, considérant le récent point passé au dernier Conseil, à propos d’une prestation superficielle et trop rondement menée de l’ISSEP, considérant le mail que je viens de citer et qui peut s’interpréter comme une façon pour le Collège de se laver les mains dans ce dossier, il est urgent, Monsieur le bourgmestre, que vous nous donniez maintenant votre position sur ce dossier.
L’église de Landenne n’est pas un édifice ordinaire.
Elle est l’œuvre d’un architecte liégeois de renom, Jean-Barthélémy Renoz, auquel on doit des monuments emblématiques de la Wallonie, par exemple l’Hôtel de ville de Verviers, l’église du Saint-Sacrement à Liège ou encore le Waux-hall à Spa. Autant de monuments qui seront mis en valeur au travers des prochaines journées du patrimoine consacrées au XVIIIème siècle et à sa symbolique politique pour la Wallonie.
Et puis, au-delà de cette thématique, cette église est notre patrimoine, à nous Andennais. Et les Landennais ne comprendraient pas que le terme de deux décennies d’hésitations se soldent par une issue que je n’ose même pas formuler.
Interpellation déposée par Philippe Mattart au Conseil communal du 17 novembre 2014